12/12/2013


Son oeuvre, Hermann la définit lui-même en ces termes : c'est un film d'épouvante expérimental. En cette froide fin d'année, le tout jeune artiste plasticien - et pour le coup réalisateur - a l'honneur (inavoué) de nous présenter Les Chats du Malin, projeté en avant première le mercredi 4 décembre 2013 sur le merveilleux écran du fameux amphithéâtre de l'école nationale supérieur d'art de Mulhouse - ou Le Quai pour les intimes.
Trêve de plaisanteries.
Il s'agit là d'un moyen métrage entièrement tourné à l'aide d'un de ces téléphones portables du début du siècle, dans le genre "frigo". 
Il en résulte bien évidement une pixellisation intense et intransigeante des sujets capturés par l'appareil, si bien que beaucoup de séquences vont même jusqu’à tendre vers l’abstraction. Parfois on distingue un truc, et en est plutôt fier, on se demande si on est le seul dans la salle à avoir su relever un vague visage parmi tous ces petits carrés qui composent et décomposent l'image durant la demi-heure que dure le film.
Est-ce là une recherche picturale visant une esthétique lo-fi subtile et mystérieuse ou tout simplement un énorme doigt d'honneur adressé à la croissance toujours plus croissante du pouvoir de la technologie sur notre société de consommation (technologie qui, il faut bien l'envisager, finira tôt tard par nous consumer), ou encore plus simplement la revendication d'un droit de créer malgré un statut social d'étudiant précaire, avec les moyens du bord comme on dit de par chez nous. 


Surement un peu de tout ça à la fois. Ce qui est certain c'est que l'approche complètement décomplexée de la notion de "film" - voire de cinéma - fonctionne au final plutôt bien, et on peu même dire que, tout comme les chats omniprésents tout le long du film, S.A.P Hermann a su retomber brillamment sur ses pattes. 

Le film s'ouvre sur une plutôt longue séquence (chose qui se fait plutôt couramment dans le cinéma actuel) visiblement tournée au petit matin dans un camping, genre festival, foutrement décadent et pourtant magique. On ne sait pas vraiment si l'on doit considérer cela comme une situation initiale (on peut voir les grilles qui cernent les tentes rigoureusement déployées afin qu'aucun de ces festivaliers sauvages ne s'échappe, puis petite contemplation de l'aube accompagné de commentaires plus ou moins anodins. un mec ronfle fort, la tête sous les fesses d'un autre mec.) 
Alors que l'on commence à se demander dans quel genre de merde on s'est embarqué, l'apparition du titre (clignotant et flashy, un peu à la Gaspar Noe) vient nous interrompre dans nos doutes et nos interrogations et très vite on comprend que la suite du film d'épouvante qui commence à peine promet d'être surprenante. Alors on se relâche un peu et on cesse d'attendre une quelconque révélation évidente quant au sens  de la chose. Cette prise de conscience effectuée, on n'a plus qu'a se laisser porter par la bande son volontairement bruitiste et insistante, viscérale, inquiétante et obscure qui accompagne de manière cohérente les images troubles et tremblotantes, bande son qui d'ailleurs a été composée par Hermann lui même (on est jamais mieux servi que par soi-même, comme on dit). 
L'atmosphère particulièrement stridente que l'on peut attendre d'un film d'épouvante est donc bien au rendez-vous, de ce côté là il n'y a donc rien à dire. Certaines coupures violentes viennent cependant parfois casser l'ambiance morbide et nous ramènent à une sorte de réalité tangente, un peu comme lorsque l'on sursaute dans son sommeil : c'est plutôt désagréable, mais peut-être est-ce un effet que cherche à nous transmettre le réalisateur, tout laisse croire qu'il s'agit là d'un parti-pris assumé et sans concession. 
Toujours est-il que Sébastien Hermann n'est pas le genre de type à se contenter d'une base audio-visuelle déjà cohérente et pertinente ; c'est pourquoi il ajoute à sa réalisation une dimension poétique qui n'alourdit en rien la mixture finale, mais qui bien au contraire apporte une sensibilité franche, une fluidité haletante, même une sorte de narration à ce patchwork chaotique de scènes quotidiennes qui composent le film. Les sous-titres sont rouges flash, et viennent ponctuer le brouhaha de citations de films piochés ici et là dans les fichiers .srt. Il en résulte une sorte de cut-up, un collage verbal à la dada, un brin surréaliste et pourtant très évoquant. 
"La vie est trop courte mais tu peux te retrouver dans les merde."
"Est-ce que tu l'embrasseras d'abord ou tu le suceras tout de suite ?"
Des extraits courts et puissants, effet coup de poing garanti pour les oreilles les plus chastes de la salle. Le jeune artiste est un amoureux de l'aphorisme au sens large. 
Le chat noir nous demande "Tu veux quelques chose ?" puis "On prendra de l'essence et on reviendra vous chercher."
Sébastien Hermann est visiblement atteint d'un trouble obsessionnel et paranoïaque porté sur la figure du chat. Les chats sont ici habités par d'évidentes forces maléfiques, ils sont omniprésents et surtout mal-intentionnés, ils sont le côté obscur des Chats Perchés de Chris Marker. 

Mention spéciale aux chacteurs, qui interprètent à la perfection leur rôle démoniaque.

La plupart des séquences sont tirés de scènes du quotidien du réalisateur, un peu à la façon des films-journal de Mekas, ainsi que d'explorations, d'errances, de promenades dans lequel il nous entraîne avec lui. D'autres scènes ont été légèrement scénarisées et jouées, afin de donner un semblant de narration, juste ce qu'il faut pour donner au film une sorte de dynamique suggérée. Si l'on est bien attentif, on pourra remarquer quelques images subliminales dissimulées tout le  long du moyen-métrage : c'est plutôt drôle et excitant, et on est fiers de l'avoir remarqué, celle là.
En résumé, nous avons là une belle réussite du jeune Hermann, riche et viscérale, sombre, tragique, mais très justement dosé, évitant ainsi un pathos qui aurait pu ternir la chose. 

25/11/2013

On a tapé fort sur la vitre frêle.
Il y a des morts c'était violent,
Et très lent. Des doigts des jambes
Des bras des nez,
dénués d'amour
dénués de joie
humides encore et en sommeil
Elle ploie.

Je viens de passer les quatre pires heures de mon existence.

13/10/2013

Tu sais, parfois je t'envie, je me dis : tu es loin d'ici maintenant, et moi je stagne dans la fange ambiante, sans essayer de m'en extirper, comme si j'y étais bien. C'est vrai que j'y étais bien, fût un temps. Qu'est ce qui a changé ? Est-ce moi ou est-ce elle ? J'aimais Mulhouse. Un soir sous l'emprise d'un puissant euphorisant, j'ai lancé : "Mulhouse est comme un tas de fumier sur lequel poussera une belle rose." J'étais convaincue de la fertilité de cet ancien spot ouvrier, cette ville dont l'âge d'or était à présent loin derrière pourtant. Les superbes murs de briques rouges, vestiges de son industrie prospère dans le domaine du textile, ont beau avoir résisté aux épreuves du temps, ils suintent encore de sueur, et personne n'ose trop y toucher. Nous, les jeunes êtres déviants, les freaks en quête d'une dose d'adrénaline, on aime bien ça, les décombres, les lieux délabrés, les hangars pas trop durs à squatter dont le toit menace de nous écrabouiller à chaque pas qui résonne un peu trop fort. On se demande ce qu'on va en faire. La tendance est à la conversion en lieux dits culturels, et je trouve ça plutôt sympa. Les associations alternatives fleurissent, fanent, il y a bien quelque chose qui bouge dans ce marécage. Des gens passionnés se décarcassent à faire passer des groupes dont la plupart des gens de ce monde n'ont jamais entendu parler mais qui n'ont rien à envier aux plus "grands" néanmoins. A un moment donné, je fréquentais constamment les bars où se jouaient régulièrement ces concerts, mais ça m'a gonflé. Alors que semaines après semaines je me retrouvais constamment au sein d'une même communauté dite "Beaux-arts" dans les mêmes endroits avec les mêmes gens qui racontaient les mêmes choses sur les mêmes sujets avec le même avis et la même voix et les mêmes gobelets dans les mêmes mains remplis de la même bière imbuvable, le sentiment d'enfermement était tel que j'ai purement et simplement arrêté de côtoyer ce milieu. Au début, c'était rigolo, parce que j'arrivais dans une sorte de secte où tout le monde se connaissait, et où le délire général était déjà là, ancré, et moi j'étais une gamine, et j'avais cette foule à conquérir. Maintenant que je connais tout le monde, aussi appréciables soient ces gens, il n'y a plus cette excitation du défi, où bien ça ne m’intéresse plus. Je me rendais compte que je tournais en rond. Il faut savoir que c'est ce qui occupait principalement mes week-ends voire mes soirées en général, donc je me suis vite retrouvée à ne plus rien faire et à ne plus voir personne. J'ai en plus quitté mon appartement puant et je suis retournée chez mes parents. Grosse erreur de ma part d'ailleurs que je suis en train de songer à rectifier dans les temps à venir. Traumatisée de mon année passée dans les recoins les plus sombres de mon esprit humide et boueux, je suis donc retourner m'isoler dans le cocon familial qui pour la première fois de ma vie me semblait accueillant et rassurant. Ici, il faisait chaud, et il y avait de quoi manger à ma faim. Je m'entendais bien avec mes parents depuis l'obtention surprenante de mon baccalauréat, donc de ce côté là, il n'y avait aucun soucis. Mais je me perds, je parlais de Mulhouse. C'est qu'avant, j'étais prête à tout pour aller picoler un peu trop dans un bar avec n'importe qui. Je rentrais complètement ronde à la fermeture, je marchais de quarante minutes (quand j'étais pompette) à deux heures (quand j'étais vraiment bourrée) pour revenir à la niche. Ça m'allait très bien. Parfois je faisais des rencontres. Quand un mec du genre lourdingue et en manque au point de bondir sur la première gamine de seize ans qui passe (il est vrai que je faisais plus vieille) m'abordait, je réagissais foutrement bien. Je n'ai jamais eu de problèmes et je pense que je dois ça à ma dextérité rhétorique notable, et à l'absence de peur dans mon attitude. Je veux dire, j'étais tellement paumée qu'il pouvait m'arriver n'importe quoi, j'en avais vraiment rien à péter. J'aurais bien voulu qu'il m'arrive quelque chose même, histoire d'avoir une réelle raison d'aller mal, un justificatif à fournir à une société qui ne conçoit pas que l'on puisse souffrir sans saigner ou se briser un os en mille morceaux concrets. J'ai donc passé un été en total retrait, je n'ai pas bu, pas consommé de drogues, j'ai travaillé, j'ai vraiment essayé de me ranger un moment, d'instaurer une paix entre moi et le monde. Cette existence dont je sortais me dégoûtait. J'aimais Mulhouse, j'aimais ses lumières orange trop orange, j'aimais ses relents de pisse et de merde, j'aimais ses clodos et ses weirdos, et ses freaks et ses bobos, cette mixture nauséabonde et visiblement moisie à la surface, j'aimais les "nik ta mère" qui recouvraient les murs, les "R1T", les gribouillages en tout genre à la bombe, toute cette laideur et toute cette misère impalpable étaient telles, que le tout en devenait sublime. Avant j'étais partie prenante de ce côté obscur, j'étais un de ces monstres perdus et malheureux prêt à tout pour oublier, j'étais à Mulhouse-la-Nuit chez moi. Maintenant que me voilà plus ou moins "posée" dans ma tête, moins paumée, c'est toute la ville qui a changé. Je marche et j'ai peur. Tout m'a l'air plus sombre, mes yeux ne sont plus habitués à l'obscurité. Les gens sont plus agressifs : quand je passe il me semble que tous se retournent et me poignardent du regard. Ils ont comme une réaction d'anticorps vis à vis de l'intrus que je suis dans cet organisme nocturne moite. Ils le sentent. Ils me le font sentir. Je n'ai plus rien à faire ici. Je ne suis plus des leurs. à suivre

08/10/2013


L'archet est propice à la complainte. Les gens bien n'aiment pas quand ça grince. Moi je trouve que ça dit ce que ça veut dire. Grincer. Chouiner, crisser, il y a quelque chose d'aigu, de tendu, dans le frottement que je n'ai trouvé nul part ailleurs dans la musique. Mon doigté débutant n'arrange rien à l'atrocité que subissent les oreilles sensibles de ces lieux. Mon chat chéri, là, à côté de moi, est sourd - béni soit-il.
Le crin accroche les longs fils de métal, s'usent, et les longs fils de métal vibrent, doucement, usent le crin qui casse par endroits. Combien de coups avant que craque le dernier rescapé. Combien de râles délayés en milles ondes avant que la tension ne cède brusquement à rien (zéro), peut-être, imaginons, le claquement des cordes que plus rien ne sépare du bois dur et froid désormais. L'accord final, très probablement faux, surplombé d'un point d'orgue. Un a un donc, les crins cesseront de frotter et abdiqueront à jamais, valeureux guerriers tombant un à un au combat (ce n'est même pas le leur). Et ainsi je cesserai de hurler , je cesserai de larmoyer, de miauler, de couiner, et ainsi je devrais trouver

autre chose.

06/10/2013

N’attendez pas que l’inspiration s’invite en douceur. Courez-lui après avec une matraque. Jack London

Cornes lisses et impétueuses à l'assaut de la nuit flasque et fluide sans druide comme guide gémissant, le drapeau de la colère et de la misère, austère et jeune pourtant, on ne le reverra plus. Je sais.
J'essaie.
Encore et encore et encore et encore et puis plus d'un coup c'est fini.
J'essaie. J'essaie. J'essaie. J'essaie.
Je sais.
Je vais te tuer si tu ne me regardes pas. Regarde moi. Moi. Regarde moi. Je te jure que j'aurais ta peau, espèce d'imbécile malheureux, alors regarde moi.
Ça, la. Ça, c'est beau non ?
Non ?
Et moi ? Je suis comment ? Comme ça ? Et puis comme ça ? Ça va ? T'aime bien ? Non ? Mais regarde quand je te dis "regarde" ! Est-ce que j'ai vraiment besoin de te le dire : regarde moi.
Vous aussi, vous feriez bien de me regarder. Admirez le spectacle. C'est pathétique automatique fantastique dramatique utopique fantaisiste et drolatique, ça crève les yeux, y a un truc qui crève les yeux, c'est gratuit et c'est pas creux, donc bon, profitez, quoi. Je vais vous tuer, sinon. Promis.
J'ai dis promis ? Moi j'ai dit promis ? Mais non. J'ai jamais promis. Jamais rien promis. Oublie. Oublie. Oublie moi.
Oublie moi Oublie moi Oublie Moi Oublie Moi Oublie Moi Oublie Moi Oublie Moi. STP.
Je me ferais toute petite. Toute petite comme une souris. On ne me verra pas.
AAAAAAAH UNE SOURIS ! JE T'EN PRIS JEAN-PIERRE, FAIS QUELQUE CHOSE !, crie la ménagère de moins de cinquante ans à son mari devant le foot à la télé.
Pétasse. Comme si la souris allait te manger.
Donc Jean-Pierre gromelle, il lève son gros cul plein de graisse toute grasse, il gromelle encore, puis à quatre patte, il pécho la souris (elle était derrière le four), et il ...
J'hésite.
J'hésite à dire ce qu'a fait Jean-Pierre de la souris.
Vous ne voulez vraiment pas savoir ce que Jean-Pierre à fait de la souris.
Il l'a kkkrkrkkshhhquitkkkkkkkrrrrpffffrttt, puis il l'a hhhghghrhrrrrtttttqqqppprftprftprft, enfin, c'était pas beau, pas beau à voir, ni à entendre, ni à sentir, encore moins à goûter.
Enfin. On en arrivait là parce que je disais plus haut
Cornes lisses et impétueuses à l'assaut de la nuit flasque et fluide sans druide comme guide gémissant, le drapeau de la colère et de la misère, austère et jeune pourtant, on ne le reverra plus. Je sais.
Donc j'essaie. Mais j'essaie quoi ?
J'essaie de te dire quelque chose que je sais, et que tu sais aussi.
Je t'.
Je t'.
Merde.
Je t'.
Bon.
JE T'.
Rien à faire.
MAIS QUELLE HORREUR JE VOUS LE DIS QUELLE HORREUR QUE CE FUNESTE PARAGRAPHE INFINI SANS FIN ET SANS SAVEUR ET SANS FIN ET SANS FAVEUR ET SANS SEINS ET SANS SASSE ET SANS CESSE ET SANS CASSE ET ÇA ENCAISSE ET CENT TITRE ET SANG TITRE ET SANS TITRE ET SANS INTERRUPTION SANS NOM SANS NON SANS SANS SAINT SAENS
bref. sans.
Et j'essaie et j'essaie j'essaie j'essaie d'écrire un truc. Un truc potable.
Un truc que vous pourriez lire sans saigner des yeux.
Un truc quoi. Allez.
Merde, tu me la donnes, l'inspiration ?
Quand est-ce que tu viens souffler dans ma bouche dans mon âme ?
Redonner vie à la boue informelle et stagnante de mon esprit malade et colmaté ?
En attendant j'essaie.



Je sais.

Oui ! J'ai pleuré !
J'ai pleuré pleuré pleuré PLEURÉ 
Vous m'avez tous vu PLEURER

Puis pourquoi on pleure, en plus
(Puis pourquoi maintenant)
Connards de nerfs novices
Vos cris murmurés
Sourds, aveugles, muets, 

« Lapauvrejen'aimeraispasêtreàsaplace »

Vous avez tort,
Tort Tort Tort
Parce que de vous tous
Je suis la plus faible
Je suis la plus forte

Je porte sur mon dos
Le monde
Qui m'écrase
J'ai mal
Je jouis

Je touche du doigt les choses
Qui brûlent

05/10/2013


Vous allez rire. Vraiment, vous allez rire.
Je suis encore là !
J'ai pardonné, et j'ai été pardonnée. 

Très jeune déjà je la voulais toute à moi. L'envie de pénétrer entre ses murs et d'y poser mes marques un jour ne différait en rien d'un coup de foudre pour un tiers. Et dans ma tête, tout était limpide : elle sera mienne, j'y entrerai. Certaines adolescentes fantasment sur Johnny Depp (quoique, Johnny Depp est un vieux maintenant, disons Justin Bieber), et moi je fantasmais sur une école. J'y suis entrée. Au début, comme dans toute liaison passionnelle, l'euphorie était à son comble. J'arpentais chaque pièce avec un plaisir certain, et les allées et venues dans ses longs couloirs sombres me rendaient toute chose. Orgasmiques premières fêtes, une idylle fusionnelle, en anglais on dit "bliss". 
Puis tout naturellement, j'ai épuisé le coup de foudre. Je partais de tellement haut, il était normal, logique même que je finisse bien bas. Les étoiles dans mes yeux se sont éteintes, et l'or est devenu pierre, la nuit est tombée sur l'Eldorado, et j'ai eu froid. Partir, voilà ce qu'il me restait à faire, à mon sens. J'ai cessé d'y croire. Comme un couple qui se laisse couler, sans aucun espoir concernant un éventuel "demain". 
J'ai essayé, un peu. Parfois. De me conforter dans l'idée que c'était mieux comme ça. J'ai cru que la rupture me ferait plus de bien que de mal. Mon cœur a saigné. 
Physiquement, j'étais toujours là, donc, or mentalement, j'étais déjà à dix mille lieux de mon amour. Alors que je commençais à me préparer sérieusement à mon départ concret, un prof Beau Gosse m'attrapa au passage et m'embarqua dans un coin, "en skreud". Il me dit "Tu te rends compte de tout ce que tu perds ?"
Je répondis "Je peux très bien faire sans. Puis, je suis jeune, pourquoi m'enfermer dans cette relation alors que j'ai tant de choses à découvrir ?" Puis, lui : "Pour partir loin, il te faut un minimum de bagages, et c'est ici que tu peux l'acquérir. Tu pourras partir plus tard, et on pourra t'aider. Tu aimes Londres ? Tu pourras aller à Londres. Ou n'importe où hors de ces murs. Mais pour l'instant, s'il te plait, réfléchis à ce que tu perds, et à ce que tu ne retrouveras plus ni ici, ni ailleurs."
Je n'ai rien dit, sinon "Ok." et "Bon, je vais réfléchir."
Et là j'ai réfléchi, un jour. Le lendemain, c'était reparti. J'allais prouver à ce lieu que tout n'était pas vain. J'avais une semaine avant la fin. Je lui préparai avec amour une petite exposition digne de ce nom, de toutes mes forces et avec tout mon cœur. Le jour J, l'école sourit devant mon effort, mais baissa la tête en m’annonçant "c'est trop tard.". Je fermai les yeux et serrai les dents. C'était prévisible, bien sûr. Comment accueilleriez vous un ex qui vous aurait délaissé cruellement un jour, et qui reviendrait six mois plus tard avec un gros bouquet de fleur et une bague de fiançailles ? 


Pour l'école, tout était clair, et c'était fini. Je m'en voulais terriblement. 
Ainsi, avec l'aide du prof Beau Gosse et du prof à la Gueule Cassée, je me battis pour reprendre ma  place auprès d'elle. Je lui envoyai des lettres, et mes amis tentaient de leur côté de la convaincre qu'elle aussi perdait quelque chose qu'elle ne retrouverait peut-être pas. 
 Elle fini par me convier chez elle pour me dire "C'est bon, revient". 
Plus rien ne serait comme avant, nous le savions pertinemment. 
L'amour que j'ai aujourd'hui pour toi, mon école, est moins bouillonnant, moins volcanique. Je t'aime raisonnablement. Tes erreurs, je ne les condamnerais plus. Tes défauts, je les accepte, ils font parti de toi. Voyons, maintenant, ce que nous pourrons construire ensemble. 

16/06/2013

With some black ink : the number one. Checkmate !
The fall. Another one bite the dust. Me. Just me. The best and the worst, forever. My dunce's golden cap. I swear. I swallow. I smile upside down. The days to come are empty. The days to come are scary. And I'm strong. No pain in my veins. No anger in my heart. I rest in peace now, cool, in my medium-death.  The show is over - something else must go on. I have to find what must go on. I must go on. No show anymore. The show is over. Annoying personnal mythology. My ego is quiet. Calm. Tamed. And my spirit is hungry. I have to reach my mountain top, I have to weave my knowledges' web, I have to cherish my soul and my arms now. No more battle, no more death. No more injures. Now, lovely myself, take care, you've got a long road to run. Now, o dear myself, you have to give birth to new stars, with chaos inside.

27/05/2013

(Petit) Point sur l'année passée, et sur les années à venir. - réflexions pour peupler le vide

J'ai le cœur brisé et l'âme terrassée (oui encore, pour ne pas changer, on est romantique ou on ne l'est pas). Me voilà au néant, calme et creux, j'expire : je m'accorde, avant le grand saut, une micro-pause, le maximum que l'on puisse s'offrir ici-bas sans sombrer dans la dissidence irréversible. Je ne pense plus, du moins, plus en mots, d'où mon manque d'inspiration verbale et l'absence de nouveautés sur ce blog. Je ne pense plus non plus en image, ni en concepts, d'où cette rupture avec l'école des "Beaux"-Arts de Mulhouse. Je ne pense plus entre quatre murs. Mais je pense penser encore, d'une toute autre manière. Je pense que je pense comme la plupart des gens pensent sur cette planète, de manière abstraite, sans ce besoin prétentieux de rendre chaque élan de mon esprit dicible et phénoménal. C'est reposant, c'est allégeant, et égoïste : je garde en moi cette énergie non-convertie grouillante de vie. Je cesse d'avorter sans cesse de chaque embryon que j'engendre. Je pense brut ! C'est criminel et fainéant ! Je n'y crois plus, vous ne m'aurez plus. Mon silence vient. Comme je vous l'ai déjà dit : je pars. Ma première destination, il se pourrait bien que ce soit Londres. C'est un petit pas pour l'humanité, mais un grand pas pour la femme. Femme. La fille disons - je ne me sens pas "Femme". C'est trop sérieux, "Femme". Mais je ne pense pas m'attarder à la capitale. C'est étrange car quand je parle de partir dans une grande ville, c'est sans problème que l'on accepte mon choix. Or, j'irais bien m'établir quelques mois au bord d'une mer grise, avec une plage de sable pâle et froid. Cela leur semble d'un coup beaucoup plus irrationnel que d'aller se perdre dans une capitale surpeuplée à l'atmosphère souillée. 

Je ne veux plus vous entendre. Je ne peux plus vous entendre. Je ne vous entends plus. J'aimerais vous entendre, à nouveau. J'aimerais rendre à vos voix et à vos corps leur chaleur initiale, l'amour que je leur portait qui s'est terni au fil du temps. Je reviendrais, avec rien à raconter, sinon le chant des mouettes au lever du jour, et un cœur tout neuf. Je rêve. Rien n'est perdu.

20/05/2013

     


       Nous arrivons à un terme. Une fin. Un début. Faux-frères et faux-contraires, la queue entre les dents. La fin. Le début. Un point fixe dans le temps.
     
       Aujourd'hui, je le sais, j'ai décidé de partir. Et combien de fois l'ai-je dit, ça, combien ? Un milliard de fois peut-être. Plus. Cela nous échappe si facilement, "Je pars.", notre esprit aime à le croire, "Je pars.", mais qui part ? Qui s'élance dans le torrent du monde, qui se jette sans crainte dans l’œil du cyclone, au cœur des choses, là où tout vit, là où tout palpite et frétille ? "Et où iras-tu ?" Me demande-t-on ? Où j'irai ? A cela je répond, comme l'aurait répondu Charles, N'importe où, hors du monde.



N’IMPORTE OÙ HORS DU MONDE.

Cette vie est un hôpital où chaque malade est possédé du désir de changer de lit. Celui-ci voudrait souffrir en face du poêle, et celui-là croit qu’il guérirait à côté de la fenêtre.
Il me semble que je serais toujours bien là où je ne suis pas, et cette question de déménagement en est une que je discute sans cesse avec mon âme.
« Dis-moi, mon âme, pauvre âme refroidie, que penserais-tu d’habiter Lisbonne ? Il doit y faire chaud, et tu t’y ragaillardirais comme un lézard. Cette ville est au bord de l’eau ; on dit qu’elle est bâtie en marbre, et que le peuple y a une telle haine du végétal, qu’il arrache tous les arbres. Voilà un paysage selon ton goût ; un paysage fait avec la lumière et le minéral, et le liquide pour les réfléchir ! »
Mon âme ne répond pas.
« Puisque tu aimes tant le repos, avec le spectacle du mouvement, veux-tu venir habiter la Hollande, cette terre béatifiante ? Peut-être te divertiras-tu dans cette contrée dont tu as souvent admiré l’image dans les musées. Que penserais-tu de Rotterdam, toi qui aimes les forêts de mâts, et les navires amarrés au pied des maisons ? »
Mon âme reste muette.
« Batavia te sourirait peut-être davantage ? Nous y trouverions d’ailleurs l’esprit de l’Europe marié à la beauté tropicale. »
Pas un mot. — Mon âme serait-elle morte ?
« En es-tu donc venue à ce point d’engourdissement que tu ne te plaises que dans ton mal ? S’il en est ainsi, fuyons vers les pays qui sont les analogies de la Mort. — Je tiens notre affaire, pauvre âme ! Nous ferons nos malles pour Tornéo. Allons plus loin encore, à l’extrême bout de la Baltique ; encore plus loin de la vie, si c’est possible ; installons-nous au pôle. Là le soleil ne frise qu’obliquement la terre, et les lentes alternatives de la lumière et de la nuit suppriment la variété et augmentent la monotonie, cette moitié du néant. Là, nous pourrons prendre de longs bains de ténèbres, cependant que, pour nous divertir, les aurores boréales nous enverront de temps en temps leurs gerbes roses, comme des reflets d’un feu d’artifice de l’Enfer ! »
Enfin, mon âme fait explosion, et sagement elle me crie : « N’importe où ! n’importe où ! pourvu que ce soit hors de ce monde ! »

Je reprends : donc je disais, je pars. Il le faut, il faut que je m'exile ailleurs. Pourquoi ? Simplement que mes aspirations sont mortes, mes rêves ont vieilli, sont devenus poussière, et le vide laissé doit être comblé à nouveau. Ici, il n'y a pour moi que fantômes et échecs. Ici, un champ de bataille dévasté. Ici, j'ai perdu une guerre. Ici, la boue étouffe chaque brin d'herbe nouveau, et aucune fleur ne poussera plus avant un temps. 
Je me rappelle de mon espoir, Mulhouse, j'avais foi, et j'avais dit : "Vous voyez, Mulhouse est comme... Un tas de fumier. Un tas de fumier sur lequel poussera une belle fleur." Il n'a poussé qu'un pissenlit puant, et me voilà déçue encore. Le coquelicot fragile a laissé place à ce chiendent jaunâtre que je suis devenue. Et, que fait-on avec ces mauvaises herbes qui infestent nos jardins ? Que fait-on ? On les arrache. A la racine, on les arrache, c'est la seule solution : il me faut me déraciner maintenant.

        Je ne veux plus parler. Je veux agir. J'ai parlé. Je me dois d'agir. Il le faut. J'ai peur, je suis terrifiée. J'ai très peur de l'inconnu. J'ai très peur comme sur le grand plongeoir. J'ai très peur parce que je me suis posée des questions. Il me faut quelqu'un pour me pousser. Alors je me pousserais. C'est l'avantage d'être plusieurs dans sa tête. Y en a toujours un pour pousser l'autre. 
J'ai mes raisons, j'ai réfléchi. Je me suis perdue je ne sais où, je m'en vais me retrouver. A l'est ou à l'ouest, au nord ou au sud. Il y a bien quelque part où je me retrouverai, je ne peux pas être bien loin. Et si je peux, au passage, rencontrer de belles personnes, aimer des hommes charmants, contempler quelques objets d'art typiques, ou je ne sais quoi de surprenant, alors tant mieux. J'ai tout à gagner, et je n'ai désormais rien à perdre.

08/05/2013



Au final, j'ai surement quelques choses à dire sur quelques choses (certains thèmes se rapprochent et se rejoignent, je le sais mais ça rallonge la liste)

Titre : Dérives adolescentes au XXIème siècle

 - Préface par San

  • De la mort
  • De la vie
  • De la réalité
  • De la vérité
  • De l'art
  • De l'amour
  • De l'être humain
  • De la guerre
  • De la folie
  • De la distraction
  • De l'existence
  • De la déception
  • De l'écorché
  • De l'autre
  • Des paradis artificiels
  • Du sexe
  • Des parents
  • Du devoir
  • Du peuple
  • De la politique
  • De l'esprit
  • De la transdisciplinarité
  • De Dionysos
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    - Que faire ?

     - Notice biographique de l'auteur

     - Dédicasses


Je ne l'aurais pas mieux dit.



Adieu !



L'automne, déjà ! - Mais pourquoi regretter un éternel soleil, si nous sommes engagés à la découverte de la clarté divine, - loin des gens qui meurent sur les saisons.
L'automne. Notre barque élevée dans les brumes immobiles tourne vers le port de la misère, la cité énorme au ciel taché de feu et de boue. Ah ! les haillons pourris, le pain trempé de pluie, l'ivresse, les mille amours qui m'ont crucifié ! Elle ne finira donc point cette goule reine de millions d'âmes et de corps morts et qui seront jugés ! Je me revois la peau rongée par la boue et la peste, des vers plein les cheveux et les aisselles et encore de plus gros vers dans le cœur  étendu parmi les inconnus sans âge, sans sentiment... J'aurais pu y mourir... L'affreuse évocation ! J'exècre la misère.
Et je redoute l'hiver parce que c'est la saison du confort !
- Quelquefois je vois au ciel des plages sans fin couvertes de blanches nations en joie. Un grand vaisseau d'or, au-dessus de moi, agite ses pavillons multicolores sous les brises du matin. J'ai créé toutes les fêtes, tous les triomphes, tous les drames. J'ai essayé d'inventer de nouvelles fleurs, de nouveaux astres, de nouvelles chairs, de nouvelles langues. J'ai cru acquérir des pouvoirs surnaturels. Eh bien ! je dois enterrer mon imagination et mes souvenirs ! Une belle gloire d'artiste et de conteur emportée !
Moi ! moi qui me suis dit mage ou ange, dispensé de toute morale, je suis rendu au sol, avec un devoir à chercher, et la réalité rugueuse à étreindre ! Paysan !
Suis-je trompé ? la charité serait-elle sœur de la mort, pour moi ?
Enfin, je demanderai pardon pour m'être nourri de mensonge. Et allons.
Mais pas une main amie ! et où puiser le secours ?



¯¯¯¯¯¯¯¯


Oui l'heure nouvelle est au moins très-sévère.
Car je puis dire que la victoire m'est acquise : les grincements de dents, les sifflements de feu, les soupirs empestés se modèrent. Tous les souvenirs immondes s'effacent. Mes derniers regrets détalent, - des jalousies pour les mendiants, les brigands, les amis de la mort, les arriérés de toutes sortes. - Damnés, si je me vengeais !
Il faut être absolument moderne.
Point de cantiques : tenir le pas gagné. Dure nuit ! le sang séché fume sur ma face, et je n'ai rien derrière moi, que cet horrible arbrisseau !... Le combat spirituel est aussi brutal que la bataille d'hommes ; mais la vision de la justice est le plaisir de Dieu seul.
Cependant c'est la veille. Recevons tous les influx de vigueur et de tendresse réelle. Et à l'aurore, armés d'une ardente patience, nous entrerons aux splendides villes.
Que parlais-je de main amie ! Un bel avantage, c'est que je puis rire des vieilles amours mensongères, et frapper de honte ces couples menteurs, - j'ai vu l'enfer des femmes là-bas ; - et il me sera loisible de posséder la vérité dans une âme et un corps.


AR

Entrons directement dans le vif du sujet, voulez-vous ? Je me sens aujourd’hui d’humeur directe, alors je vais essayer – je dis bien essayer car c’est là une de mes « mauvaises » habitudes – de ne pas alourdir cette pauvre feuille de mots pesants et ornementaux.
Adolescente ennuyée et déprimée dès le plus jeune âge, je suis effectivement  tombée dans le piège des films dramatiques pseudo-biographiques des grands noms de l’histoire de l’art et de la musique, servant à un public en manque de rêves, artistes incompris et poètes maudits à gogo. Ainsi, de Kurt Cobain, cet éternel enroué au moral rampant, à Jim Morrison, chaman romantique à la transe facile, d’Arthur Rimbaud, ce sale gosse libre et talentueux, à Alfred de Musset, ce connard tourmenté au cœur humide, je me suis entichée d’influences de cette espèce bien particulière d’artistes.
L’artiste a – trop – longtemps été pour moi un héros de son temps. Avant d’entrer en école d’art déjà, j’avais compris que cette image préconçue que l’on nous donnait de l’artiste était pour ainsi dire non-contractuelle, mais je le refusais, comme l’enfant n’accepte pas immédiatement le fait que le Père Noël n’existe pas, je m’explique : il trouve un bonnet rouge et une barbe postiche dans l’armoire qu’il n’aurait jamais dû explorer, et la repose à sa place sans mot dire, tant la déception est grande et douloureuse. C’est un rêve qui s’effondre, il comprend que ses parents ne sont pas des héros. Ils lui ont menti. Et comme l’enfant, je me sens dupée, car voilà : l’artiste n’est pas un héros. Aïe, mon cœur.
Arrivée en école d’art, enfin, on m’a mise face à cette réalité que je n’avais pas voulu voir : mes idéaux avaient dépassé – et de loin – leur date de péremption. J’avais bien cinquante ans de retard quant à mes attentes vis-à-vis de l’art. Après un tel séisme, il serait trop long de retracer ici le chemin, ou plutôt les allées-retours multiples et aliénantes, parcourues cette année.
C’est seulement aujourd’hui que s’achève pour moi une longue période de remise en question constante faite, je dirais bien « de hauts et de bas », mais voilà bien cinq mois que je suis embourbée dans le « bas ». Malheureusement, en école d’art et dans la société en général, on n’a pas le temps de se languir si longtemps. Pourtant dans mon cas, cela fut nécessaire, car je saisis désormais mieux mes attentes quant à l’art : je sais un peu mieux ce que je vais faire, mais surtout je sais ce que je ne veux pas faire.        

Mes premiers mois se sont pourtant passés parfaitement. « Ma vie était un festin où s’ouvraient tous les cœurs, où tous les vins coulaient. » Puis bon, vous connaissez la suite, j’ai assis la beauté sur mes genoux, je l’ai trouvée amer, je l’ai injurié, je me suis armée contre la justice, et maintenant, je m’enfuis ! En toute connaissance de cause. Je me suis bien amusée cette année. Je suis tombée amoureuse. J’ai commis toutes sortes de crimes capillaires. J’ai vaincu complexes de supériorité et d’infériorité. J’ai pris des drogues, et de toutes sortes, qui m’ont « illuminée » et ravagée. J’ai fait des choses « qui ne se font pas » et que je ne citerais pas ici (ce serait avouer mes méfaits trop facilement et ça ne serait sûrement pas pris pour ce que ce fut). J’ai été à des concerts alternatifs, bu de la bière, et dansé sauvagement, sur des musiques inécoutables. J’ai refait le monde des centaines de fois autour de la table de la cuisine. J’ai été aux vernissages, une coupe de vin à la main, j’ai été parler aux gens, un grand sourire aux lèvres, je me suis faite remarquer, en bien et en mal, j’ai montré à tout le monde que j’étais là, et je dois dire que cela m’a beaucoup amusé et intéressé. Mais je ne me vois pas faire ça pendant cinq ans, ou même toute ma vie, mon dieu, non !
Car n’est-ce pas cela un artiste aujourd’hui ? On m’a dit « l’artiste est un auto-entrepreneur, un businessman, un promoteur de lui-même, un défenseur de sa propre cause, c’est un beau parleur, un Dom Juan, il sait se faire aimer de par son discours, il est un politicien, un homme – ou une femme – sérieux, et travailleur, un réel intellectuel. » Toute sa richesse est dans sa boîte crânienne, ses mains ne sont qu’accessoires, et ses yeux semblent clos. Il ne se bat plus pour libérer l’art de son joug, puisqu’il n’y a plus de barreaux à sa cage.  Il est désormais libre (merci Marcel). Et comme désormais, tout est acceptable et accepté, sous réserve d’un bon bla-bla baveux, alors que faire ? Mon ressenti, mon impression, naïve si vous voulez, est la suivante : deux artistes discutent. Tandis que l’un tient un discours sur son travail traitant de la néguentropie constructiviste divergente extatique, l’autre hoche la tête mollement mais sûrement, décorant la tirade de son congénère par quelques « intéressants » et autres onomatopées ornementales.  Or, ce n’est pas comme si je n’y comprenais rien. Si je veux, je rentre, j’entends ces artistes, je comprends ce qu’ils se racontent entre artiste. Mais faites un pas en arrière, et vous aurez un aperçu de ce cette vision délirante que je ne peux ignorer désormais : vous avez devant vous, une scène digne de la plus absurde des plus absurdes pièces de Beckett.

Savez-vous ce qu’est un RPG, ou Role-Playing Game ?
Je cite une définition simple piochée sur le net : « Un RPG est un jeu de rôle dans lequel le joueur incarne un personnage qu’il fera évoluer au cours du temps. Les RPG sont basés sur un système de points et de niveaux d’expérience. En augmentant son expérience (en combattant, effectuant des quêtes), le personnage pourra monter de niveau et devenir plus fort. »
Certaines sous-espèces bien particulières de geeks sont très friandes de ce genre de jeux, et en arrivent parfois à substituer au monde réel le monde virtuel, duquel ils sont rejetés cruellement. Ils ont, sur la toile, leur cercle d’amis aussi dissidents qu’eux dans la « réalité main Stream », mais peu importe, puisqu’ils ont leur propre réalité alternative, ou parallèle. Dans leur RPG favori, ils sont preux chevaliers, dragons célestes ou puissants paladins. Ils sont connus et reconnus pour ce qu’ils sont dans le jeu, et non pas pour ce qu’ils sont dans la « vraie vie » (petit myope boutonneux pour le cliché). On rit beaucoup de ces jeunes et moins jeunes qui passent la plupart de leur temps devant un écran d’ordinateur. Or, en lisant ces définitions, je trouve qu’on pourrait parler d’une école d’art. Car il est certain que les artistes sont « dans leur monde ». Ils sont quelqu’un au sein de ce milieu alternatif, complètement hors du monde. Car si autrefois, l’art émouvait le peuple de par les prouesses techniques atteintes par l’homme, aujourd’hui, il semble factuel que le seul qui se sente un tant soit peu concerné par l’art n’est autre que l’artiste lui-même. Pour moi, et cela n’engage que moi, c’est ici que l’art perd tout son sens. Mon père, pourtant plutôt cultivé, pas érudit, mais dans la moyenne », n’a jamais entendu parler de Marcel Duchamp, ne trouve aucun intérêt à « Carré Blanc Sur Fond Blanc, et Kandinsky, avec ses peintures censé faire vibrer l’âme humaine, le laisse parfaitement de glace. Certes, il n’a pas le bagage intellectuel nécessaire à l’assimilation de la complexité moderne. Mais qui l’a, à part nous, artistes ? Personne.
Nous nous retrouvons donc entre nous, et que faisons-nous ? Nous « échangeons » idées et concepts, inlassablement, nous partageons nos points de vue,  car nous seuls nous comprenons : nous sommes des artistes. Nous nous distrayons, nous incarnons nos idéaux, des personnalités multiples, nous jouons à ce grand jeu d’échec, nous avançons nos pions afin d’avancer dans ce milieu restreint et cruel parfois. En ce sens, je trouve la situation de l’artiste similaire à celle du geek à cela près : le geek n’a aucune fierté à être geek, il l’est, tout simplement. L’artiste a davantage tendance à se considérer supérieur à ses congénères « lambda » - terme très à la mode ces temps-ci. Certes, il possède une culture certaine, il a une réflexion sur tout ce qui l’entoure, est sensible à certaines choses qu’un gens du peuple ne pourra percevoir, mais de par sa marginalité – la marge, sur une feuille d’écolier, étant sur le côté, ni au-dessus ni en dessous – il n’est en réalité ni supérieur ni inferieur.

            Ce n’est pas un jugement que j’émets ici, simplement mon observation. Je n’ai au final rien contre les artistes, ni contre les geeks. Je me rends simplement compte que je ne pourrais passer ma vie à jouer ce petit jeu, vraiment, rien que l’idée d’un huis clos du monde artistique me rend toute angoissée.
Peut-être que je parle ici, sans le vouloir, plus de mon ressenti de l’école d’art que de l’art lui-même, mais il me semble que cela revient plus ou moins au même, puisqu’un artiste sort aujourd’hui forcément d’une école d’art. Est-ce qu’un artiste est quelqu’un qui a son Diplôme National Supérieur d’Expression Plastique en poche ? En tout cas c’est ce qu’on a l’air de me dire ici.
La dernière fois, je me suis pointée à un vernissage de notre Kunsthalle locale. L’exposition « Sous nos yeux » fraîchement installée ne m’a pas déplue : j’avais « sous mes yeux » une ribambelle d’œuvres, pardon, de « pièces », toutes pour le moins pertinentes et authentiques. Avec un minimum d’empathie, j’étais capable d’apprécier chacune des pièces, cela parce que j’étais de bonne humeur, et que j’avais décidé de prendre un peu de temps pour essayer de « rentrer dedans ». Mais je dois dire que rien de ce qui se trouvait là ne m’a profondément transcendé, impressionné. Rien ne m’a touchée. Et c’est là, à mon sens, LE critère qui fait qu’une  « pièce » deviendra « œuvre ». Ce que j’attends d’un artiste, c’est qu’il vienne me chercher, qu’à la première vue de sa pièce, quelque chose se passe en moi, se casse en moi, ou naisse en moi, peu importe, n’importe quoi en moi. Est-ce fainéant de ma part ? Sûrement. Mais grande romantique que je suis, je crois aux coups de foudre, et je n’ai jamais su aimer, ni quelque chose, ni quelqu’un, petit à petit, ou progressivement. Ça doit être le choc, le crush, la révélation ultime, un truc qui te saute à la gorge, bref, du lourd. L’un des exemples que je trouve à citer ici se trouve être une gigantesque toile de Gustave Doré exposée au Musée d’art moderne de Strasbourg. Une scène christique. Que faire devant un tel monument sinon s’incliner, poser le genou à terre, et prier pourquoi pas. Je pense aussi à « Piège pour un voyeur » de Michel Journiac, performance/living sculpture/installation qui aura provoqué le scandale et traumatisé plus d’un bobo parisien. Beuys expliquant un tableau à un lièvre mort a également une place chère dans mon cœur. L’art que j’apprécie est celui qui force la réaction. Celui qui vient piquer le spectateur à un point sensible, celui qui vient le chatouiller au creux du dos, là où il ne peut se gratter seul. Mais vu qu’aujourd’hui, nous l’avons dit plus haut, l’art est libre, plus rien ne choque réellement. Enfin, peut-être que si.
A ce vernissage, l’artiste avec un grand A, le plus renommé de l’exposition, a pris la parole. Son discours m’ennuya plutôt, mais je dois reconnaître que j’ai été choquée par une de ses phrases, retranscrite approximativement ici : « Nous pouvons dire que l’enjeu principal de notre siècle, notre grand problème contemporain est celui du langage. ». Ce n’est pas par le fond que j’ai été choqué, hormis le fait que le langage esthétique a toujours été l’un des enjeux de l’art, je crois, et que le langage verbal est effectivement un « problème » au sens premier, à mon sens. Non, mis à part cela, ce qui m’a entre nous soit dit exécrée, c’est  l’affligeante mollesse, l’absence de passion, la non-résonnance de l’élucubration ci-dessus. Voilà donc notre grande quête, et voilà le ton de notre temps. Alors je m’ennuie déjà du siècle à venir. Alors l’enjeu principal de l’époque m’emmerde au plus haut point, ne me concerne pas.
Soit alors, je m’entête et me débats dans cette cage aux fauves, en espérant qu’au final, peut-être, si je me débrouille bien, éventuellement, un jour, j’arrive, directement ou indirectement, à ébranler un tant soit peu le monument académique conventionnel un peu tiède et agaçant du monde de l’art contemporain, ou soit, je jette à la poubelle mes vœux et aspirations les plus nobles pour un monde meilleur et pour un art juste et fort et je trace ma route, loin de tout ça, dans un petit village de Sibérie peut-être. A méditer.










04/05/2013

03/05/2013




























 Si tout n'est que vanité, alors soyons vaniteux.
 Battons nous contre les moulins à vent, et
 chantons nos hymnes magnifiques.

02/05/2013

Les grandes déceptions



Connaissez-vous, lecteurs, les petites déceptions ? Elles sont revenues il y a peu faire couler mes larmes, de telles déception sont d'ordinaire vécues par les enfants. Les adultes prennent ça pour des caprices, comme toujours, du "cinéma", ignorant la détresse profonde provoquée par cette petite déception : c'est une belle glace italienne au chocolat qui tombe, un doudou que l'on a depuis le berceau égaré, une maman qui, alors que vous tirez doucement sur son pull pour lui signaler votre présence, vous fait signe de vous taire avec un regard qui gronde, et continue sa conversation avec son amie, en vous caressant la tête comme on caresse un chien.
J'étais fatiguée, j'avais froid et faim, les nerfs usé par un trop plein d'errance, les idées noires revenues à a surface de la pataugeoire de mon esprit pesaient sur mes yeux humides. J'étais là, dans cet appartement à l'odeur rance de jus de poubelle. Cent mètres carrées de vide spleenétique pour une seule âme en peine, un vide lourd et chargé d'un silence assourdissant.   Alors j'appelai mon père. D'une petite voix, au téléphone "Tu peux venir me chercher ?". Il ne veux pas. Il est trop tard. Je dis que je comprends, c'est compréhensible, il est dix heures du soir passé. "C'est pas grave, salut." Je raccroche brusquement. C'est le vase qui fait déborder les gouttes d'eau. J'ai le cœur brisé. Je reste assise là, à fumer clope sur clope, une demi heure disons, puis je regarde un film. Un film qui endort l'âme et la plonge dans un rêve d'aventures et d'idéaux le temps d'une nuit.
Je rentrai donc un dimanche soir chez mes parents. J'avais passé un week-end infernal. Rien que pour deux heures, il me fallait les voir, il me fallait leur présence stable et reposante, il me fallait un amour inconditionnel, il me fallait un sourire, de la chaleur humaine. Je n'ai plus assez d'amour propre pour me préparer à moi même un repas de l'ordre du mangeable, et les snacks prêts à emporter d'environ 2,50€ que l'on peut trouver au coin de la rue - sandwiches triangles, döner kebab, hamburger américain sauce samouraï  - me font vomir rien qu'à leur évocation. Il me fallait un vrai repas. Je rentrai donc un dimanche soir chez mes parents, et ils étaient là, chacun sur leur ordinateur. Ma mère faisait la gueule, jouant à un jeu en ligne. Mon père repassait. Ma sœur écoutait de la musique avec des écouteurs. Le feu était éteint. "Ce soir c'est chacun pour soi." J'ouvris le frigo. Deux bouts de fromage se battaient en duel. Il n'y avait plus qu'un croûton de pain rassi. Je montai prendre une douche chaude, une douche réconfortante. Je me déshabillai, jetai un regard noir au monstre du miroir, et entrai dans la douche. J'allumai le jet. Cascade d'eau froide sur ma tête. Je sautai sur une serviette. Elle était encore humide. La gorge nouée, je me rhabillai, les muscles contractés et le cœur gros. Encore une petite déception.
Ce n'est rien, me direz vous, ce ne sont que des détails, des poussières dans notre vie. Alors pourquoi, comme une enfant en bas âge, ces petites déceptions me blessent-elles à ce point, elles sont des drames dans ma vie, les plus poignants instants de mon existence, j'ai à nouveau six ans, et j'ai peur de l'abandon.




01/05/2013

Sans détour, je me complais, j'ai faim.

Autoportrait aux brosses à dents. 



Quelle horreur. Je vois ce monde qui s'impose à moi comme un mur de béton sur lequel je me rue sauvagement. Je peux, je le veux, passer au travers et continuer ma route par delà la limite infranchissable. J'ai une paire de couille énorme et une carapace d'acier sur mon mental sensible. Vous avez détruit mon armure et fendu mon heaume. Vous avez brisé mon épée et j'ai courbé l'échine, me suis écorché le genou à terre. Vous êtes là sur le point de m'abattre, hé bien faites. Car je reviendrais, la tête haute, sans peur et sans reproches. Je reviendrais et je vous bénirais pour tout le mal que vous m'avez fait, car il aura contribué à ma force. Merci à vous, je vous haime encore et toujours.




Il me faut avancer, maintenant. Il me faut rompre le fil gluant
De l'araignée dégueulasse et possessive.
Il faut que je me dégage de l'humus des cadavres,
Et de l'haleine putride de mes fantômes criards.
Il me faut traverser cette pataugeoire,                              
"T'es plutôt du genre "Baroque", m'a-t-on dit. Chelou
Sans fond ni forme, vers l'horizon.
Il me faut courir après le soleil,
Retarder l'heure du crépuscule.
Il me faut apprendre, à écrire, à chanter,
A peindre et à aimer, à souffrir dignement.
Il me faut obéir. Il me faut OBÉIR, oui,
A mon cœur riche et à mes envies pauvres.
Il faut que je naisse, pour l'énième fois,
Une fois encore, je sens une mort
Il faut que je meurs, oui, sans pleurs et sans bruit.
Il me faut survivre quand viendra la nuit.


J'ai réalisé à nouveau, car j'avais déjà réalisé cela avant même d'avoir réalisé bien d'autres choses, qu'il me fallait avancer afin de me réaliser enfin.

MAIS BOUGE TOI LE CUL



18 ans : Chapitre II


j'abandonne (pour ce soir)




Il fallait que je vous raconte ...

                   Chère San,

         Il faut que je te raconte, ce que nous avons vécu sans toi, car ce fut réellement regrettable que tu ne sois pas des nôtres hier soir, et c'est là un moyen de partager après coup, le fantôme du moment passé, afin que tu y prennes part d'une certaine manière.
          Comme tu le sais, Marine est sur Mulhouse en ce moment. Lundi soir, elle vint à l'appartement, pour nous voir, et partager un moment ensemble, autour d'une petite bouteille. Ce soir là, je travaillais (j'assurais la garde hebdomadaire des petits monstres que tu as déjà rencontré), et je rentrai un peu tard, fatiguée, mais déterminée à me mettre une "race" comme on dit du côté de Mulhouse - Capitale du crime, c'est bien connu. J'achetai donc une bouteille de Muscador (à l'ancienne), et une autre de Leffe Ruby, bière aromatisée aux fruits rouges, dans l'espoir que Charline puisse y goûter, elle qui a horreur de ce breuvage d'ordinaire. J'arrivai à la maison. Dans la cuisine, Eric, Marine et Charline, bla-blatant école et stress, copains et amour, Eric muet mais pas sourd, un peu de bière encore sous la langue. Sur la table, une bouteille de vin, encore, il n'y en a jamais trop.
           Je m'assis donc en leur compagnie. Nous discutons. Comme ça. Charline n'a pas vraiment le moral. Elle essaye mais ne peut nous feindre : nous savons bien reconnaître son engouement factice. Nous commençons à boire, j'annonce que ce soir, je me mets "bien". Nous continuons d'aménager le silence le cul écrasé sous notre corps mou. J'y songe, je propose : "Si nous allions à l'Ile ?" Silence. Nous nous regardons. Partagées entre la tentation et la non-motivation aiguë. Oui. Peut-être. Pourquoi pas. Hoho. Mais nous conservons notre conversation tranquille. Le temps passe, l'ambiance porte une mélancolie palpable. "Bon, on va à L'Ile. On y va. Vraiment. Maintenant." Les autres avaient surement ressenti en elles le même agacement dont je fus prise. La parole toujours, l'action jamais. Il était temps de vivre, Marine présente, une expérience avec elle, pour ne pas simplement devenir au fil du temps, des "vieilles amies" loin des yeux et loin de cœur.
            Mais avant, il nous fallait nous échauffer : je branche la musique (celle ci-dessous convenait parfaitement), quelques spots de lumière pseudo-psyché rotatives aux couleurs primaires, nous ouvrons le muscador et ce fut parti. Le volume au maximum, les enceintes qui craquent, nous commençons alors à nous démembrer sur les cris de Rebeka Warrior. Deux chansons plus tard, dans la rage et la fureur qui nous emportait, nous jetions au loin pulls XXL, T-shirt mouillés , soutien-gorges qui grattent, et nous voilà ondulantes et transpirantes dans l'obscurité enivrante. Eric reste dans la cuisine : il ne sait pas où se mettre. Pudique enfant frustré, il passe en se cachant les yeux avec une main tendue. Nous nous étalons de la peinture sur les seins, des peintures de guerre, car c'est à la bataille que nous allons ce soir. Nous rions, nous dansons, nous crions, nous rions... J'ai du Muscador dans la bouche. Marine face à moi. J'expulse le liquide en une fine pluie sur son visage : la voilà baptisée. Elle me rend la pareille. J'accepte. Pour Charline, nous décidons de nous unir : nous l'attendons à la porte, et dès lors qu'elle la franchit : pffffrrsht ! Elle râla. Nous dansions, dansions, dansions, nous glissions dans le muscador, glissions parfois, je tombai et Marine me tombai dessus et Charline nous tombai dessus. En dessous de ma tête, un objet très pointu que j'évitai de justesse - le pied de bronze d'un miroir brisé, j'en tâtai la pointe, sous le choc, mais pas trop : je me relevai et me remise à danser follement. - ce soir, peut-être Dieu m'aimait-il ? Eric avait fermé la porte de sa chambre à clé : celui qui s’adonne quotidiennement au sacre de l'empirisme fondamental aurait-il peur de nous, les sorcières déchaînées. Il va de soi pourtant que l'atmosphère était plus libertaire que lubrique vraiment, et qu'il ne courait aucun danger, sinon d'en prendre plein les yeux, lui, invité de ce moment unique. Nous voulions lui faire partager notre feu, lui qui n'avait de ses yeux jamais vu l'Ile dans ses plus beaux-jours. Mais il persistait dans son refus gêné. Tant pis. Je fermai l'ordi, attrapai le vin, le fond d'absinthe, mes clés, et nous voilà parties pour un autre monde, encore inconnu cela : nous n'avions jamais connu l'Ile de nuit. Nous arrivâmes : il avait plus et la pente était extrêmement glissante. Le pont cassé était presque immergé, nous n'avions qu'une petite parcelle pour prendre place, mais nous étions d'autant plus proche de l'eau. Le boucan de la cascade nous enivrais déjà. Savourant quelque peu l'instant, nous fumions et buvions l'absinthe, et j'eus une pensée à ces poètes du passé fou de la fée et de ses ravages. Nous pensions à toi, San, nous pensions que nous te voulions à nos côtés, que tu aurais du vivre cela, fumer cette clope avec nous, alors, à toi, nous levâmes la cigarette, et nous la jetions à l'Ile : elle te l'apportera bientôt. Je jetai mon poisson pendentif : lui aussi t'arrivera peut-être. J'enlevai mon pantalon : ce soir était le soir où nous nous baignerons. Je plongeai les deux pieds, et les ressortis aussitôt : température, dix degrés, ressentie moins vingt. Je plongeai alors mon visage entier et mes cheveux dans l'Ile. Baptême, encore. Et nous voilà seins nus encore, baigneuses hurlantes et saoules, ma langue dans sa bouche et ses mains sur sa nuque, sur mon ventre sur la pierre. Amalgame charnel amoureux et platonique, douloureux dans la nuit fraîche, la bouteille de vin achevée déjà. Et puis cet opinel nous tomba sous la main : bonheur/malheur à nous ! Tu imagines la suite. Nous rentrions les bras sanglants, encore une fois. Peut-être San, as-tu ressenti notre amour envers toi, car crois moi, tu étais là d'une certaine manière.
               Donc nous rentrions (au passage je vomis devant le Quai, en tant que performance artistique bien sûr), et nous nous fîmes couler un bain chaud. Le repos des guerrières, entassées dans la petite baignoire, nous passions dans la douceur et le silence paisible. Le projecteur coloré illuminait la fumée de nos cigarettes que nous écrasions sur le bord de la baignoire. Nous voilà une fois encore déchirées par la vie, et marquées, intérieurement et sous la peau. Idiotes et intrépides. Derrière nous, une aurore terrifiante et bouleversante. Devant nous, un crépuscule magnifique.
           

                 Un jour, San, nous retournerons à L'Ile ensemble, et nous vivrons. Et naturellement, je l'espère, une telle folie nous reprendra. En attendant, je t'aime, et je t'envoie cette missive - ce post - afin de t'offrir, à toi et rien qu'a toi, le récit maladroit et un peu bâclé (car il est vrai que je suis encore exténuée  endolorie par la danse et la transe, je marche difficilement, haha) de cette expérience inédite. Jamais nous n'avions repoussé aussi loin nos limites, je suis fière de moi.


PS : les coupures c'est juste un peu con, c'est reparti pour les manches longues un été, et de plus, celles ci sont très visibles. Bravo. Vraiment. 



28/04/2013

Pas un mot ne se promène dans ma tête.


Dansez mes amis, dansez mes frères, n'ayez pas peur de cette chair pourrissante qui enrobe votre âme solitaire. Dansez. N'ayez pas honte. Ne craignez pas. Dansez dans vos prisons putrides, dansez dans vos maisons hantées, sentez dans vos organes la vie de ce monde, ses vibrations merveilleuses, sentez les vous dis-je. Si votre cœur est de pierre, alors faites qu'il soit de grès tendre et rosé. Mais dansez, dansez. Je jurerais que le monolithe seul érigé sur la plaine danse, dans le rêve de ses quelques millénaires de sommeil. Laisse ton âme animer cette viande volcanique, laisse monter ta lave à tes joues, laisse les rougir. Abandonne toi, et lorsque de ton front perleront quelques gouttes à la saveur de l'océan, sache qu'avec elles s'échapperont toutes tes contenances nauséabondes et nuisibles, toutes tes saletés douloureuses, elles s'écouleront et tu les laisseras fuir dans le feu de la passion. Dansez pour votre salut. Dansez pour l'amour de Dieu, pour l'amour de vous, dansez au soleil couchant, dansez au déclin ultime, DANSEZ !



27/04/2013

Conversations



Juliette - Qui de nous deux a le plus tort ?
Juliette -Celui qui insiste, car la vérité n'existe pas.
Juliette - J'aime donner de l'ordre.
Juliette - J'aime donner des ordres.
Juliette - J'aime donner désordre.
Dr Knock - Il n'y a pas de gens bien portants, il n'y a que des malades qui s'ignorent.
Juliette - Il n'y pas de gens bien-portants, il n'y a que des morts-vivants.
Nietzsche - Heureux les oublieux, car il viendront à bout de leur bêtise.
Juliette - Il n'y a pas de gens heureux, il n'y a que des oublieux.
Juliette - Il n'y a pas de grands méchants.
Juliette - Il n'y a que des survivants.
Un manifestant (criant) - Police partout ! Justice nulle part !
Juliette - Il n'y a jamais trop justice pour gueuler "Nique la police" !
Œdipe traverse la scène, aveugle, il trébuche sur sa toge déchirée.
Juliette - Baise ta mère, tue ton père.
Un hippie traverse la scène dans l'autre sens, complètement défoncé, et s'effondre au milieu, puis sort en rampant.
Juliette - Fais pas l'amour, fais pas la guerre
Hobbes (grandiloquent) - L'homme est un loup pour l'homme.
Nietzsche (grandiloquent) - L'homme est un pont vers le surhomme.
Juliette (les giflant) - L'homme n'est pas un loup pour l'homme, c'est pas un pont vers le surhomme.Des petits africains avec un gros ventre courent sur la scène en chialant.
Juliette - Je sais plus ce que j'ai vu à la télé ça m'a pas plus.
Coups de feu, les enfants tombent l'un sur l'autre à tour de rôle, morts.
Juliette - Des cadavres sous les décombres, des images que nous encombrent.
Silence
Juliette - Absurde
Juliette - Qu'est ce qu'on fait maintenant ?
Vladimir et Estragon (en chœur) - On attend Godot ?
Juliette (les tuant) - Ta gueule Godot.
"Nique la police" !
Antonia - C'est différent, c'est tout.
Juliette - Tu crois ?
Antonia - Je m'ennuie à mourir.
Juliette - Ici, il n'y a pas de distraction possible.
Rebeka Warrior (gueulant) - On s'ennuie dans la vie on devient fou ici ! (elle sort)
J
uliette - FIN
Jim Morrison (chantant) -This is the end...
Juliette (le tuant) -J'ai dit FIN.
Juliette - J'ai faim.
Juliette (la tuant) -J'ai dit FIN
Rimbaud - Encore une saison en enfer !
Le public hue sauvagement, tandis que Rimbaud traîne le corps de Juliette hors de la scène.


                        FIN





(s'cusez la divagation hohoho)

26/04/2013

Journal intime, l'indicible, vaudeville et danse macabre


Phase d'acceptation.





L'adolescente sur le point de mûrir ne mûrit pas.
S'accroche au mal pour toujours,
Car c'est appréciable


Le romantisme n'est pas donné à tout le monde,
Il y a incompréhension, et appréhension
Envers notre être



Distractions superficielles, masturbation existentielle
Qui de nous deux a le plus tort ?
Car la vérité n'est point.

La conscience tranquille et triste,
L'ennui profond constant
Me pousse a exister

S'arracher les cils, pour ne plus cacher le trou de notre âme
Ce qu'il nous reste à faire, pourquoi pas
Ou reprendre la partie, vraiment




Et en rire ? Peut-être. Point